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US 17

U.S. 17 - Vingt ans après

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Vingt ans après

Vingt ans passèrent... Nous arrivons en juin 1940. En quelques jours de combats, la bataille était perdue et avec elle la plus grande partie des matériels terrestres britannique et français, dont 500000 fusils hors d'usage ou abandonnés le long des routes : MAS 36 et mousquetons M 16 en faible quantité, mais surtout fusils 07-15 jetés aux orties sans regrets par leurs propriétaires.

En ces jours de panique, nous nous souvenons d'un gros titre de journal proclamant, quelques jours avant l'armistice : "L'Amérique va nous envoyer 500 000 fusils !". Ce titre eut le don de mettre en fureur les réfugiés pour qui seul l'envoi immédiat en France de troupes américaines, de chars et d'avions permettrait de redresser la situation.

Nous étions en plein domaine du rêve, ou plutôt du cauchemar. Mais les 500 000 fusils étaient bien réels. De quoi s'agissait-il ? Les archives nous renseignent aujourd'hui et viennent confirmer l'information journalistique du mois de juin 1940.

Les possibilités de livraison immédiate d'armes américaines à la France avaient été examinées à la fin du mois de mai 1940. A la demande des gouvernements français et britannique, les autorités américaines firent l'inventaire des stocks dont po¬vaient disposer immédiatement l'Armée de terre et la Marine des Etats-Unis. Une liste fut aussitôt établie et approuvée par le général Marshall le 36 3 juin : elle comprenait entre autres :

 900 canons de 75 (fournis par la France à l'Amérique en 1917) avec un million de cartouches, 80 000 mitrailleuses, 130 millions de cartouches de ".30-06" et ...500 000 fusils US 17 pour la plupart neufs; 250 000 fusils supplémentaires pourraient être envoyés par la suite.

Le 4 juin, les gouvernements français et britannique se mirent d'accord sur une décision d'achat portant notamment sur 535 000 fusils US 17 et 25 000 F.M. BAR à partager pour moitié entre les deux pays; 10000 mitrailleuses Browning réservées en totalité pour la France et 100 millions de cartouches de .30-06 à partager. Les Etats-Unis étant neutres à l'époque, il fallut un artifice juridique pour que des armes réglementaires américaines puissent être légalement cédées à des Etats belligérants. L'ensemble du stock fut donc vendu par le gouvernement américain à une société formée pour l'occasion : "'United States Steel Export Co." qui revendit aussitôt au prix coûtant à la France et à l'Angleterre. Le contrat collectif d'achat fut signé le 11 juin.

Le 13 juin, un premier navire, \'East-ern Prince, quittait Gravesend Bay pour la France avec un chargement de canons de 75 (en 48 caisses), 15000 mitrailleuses, 12000 fusils US 17 et 28 millions de cartouches. Le 17 juin, le bâtiment reçut par ra¬dio l'ordre de se dérouter sur un port anglais, la France venant de deman¬der l'armistice et n'acceptant plus au¬cun envoi d'armes. A ce moment, tous les contrats français (pour un montant de 600 millions de dollars) furent transférés en bloc à l'Angle¬terre. La signature du transfert se fit le 17 juin à 3 heures du matin. 27 navires furent nécessaires pour trans¬porter les stocks américains en Grande-Bretagne. Le 1er août, l'en¬semble du matériel, y compris plusieurs centaines d'avions et de véhicules, se trouvait sur les îles Britanniques.

La Grande-Bretagne était exsangue; les US 17, en dépit de leurs cartouches américaines et du problème que pouvait créer leur coexistance avec les P 14, furent accueillis avec joie et distribués aux unités de réserve de la "Home Guard". LUS 17 jouait pour la troisième fois son rôle de "bouche-trou". Un an plus tard, 785 000 US 17 supplémentaires furent vendus à la Grande-Bretagne pour la somme symbolique de 7 dollars 50 cents l'unité ! Encore une fois, l'arme passa au service de la "Home Guard" et de la réserve, libérant ainsi des dizaines de milliers de Lee-Enfield pour les unités combattantes.

Si l'on pensait que la carrière de l'US 17 devait se terminer dans les stocks britanniques, on commettrait une grossière erreur. De fait, sa carrière militaire sur les champs de ba¬taille avait à peine commencé, à l'exception des combats menés un quart de siècle plus tôt en France par les troupes américaines. Une grande partie des stocks d'US 17 pratiquement neufs allait bientôt passer dans les mains de la nouvelle armée française d'A.F.N. et s'illustrer dans les combats qui la conduiraient de Tunis à Berchtesgaden en passant par Rome et Strasbourg.

Ainsi les 500000 fusils américains promis par les journaux de juin 1940 allaient-ils être livrés avec un retard de deux ans; trop tard pour gagner la première campagne de France, mais à point pour remporter la seconde.

Afrique du Nord le 17 juin 1940
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